Ingénieur de formation, urbaniste de profession, photographe passionné, tout m’a conduit à me glisser derrière les palissades de chantier en quête d’images, à la rencontre de ces compagnons, ceux qui permettent de concrétiser le dessin de l’architecte.
Ces compagnons investis préparent jour après jour le nouvel édifice qui prendra sa place dans le paysage, constituera le nouveau repère dans la rue et ira, parfois, modifier la silhouette du quartier ou de la ville.
Tous les jours, nous nous émerveillons de l’audace, du génie créatif, de l’énergie de l’Homme bâtisseur.
Et, nous oublions souvent que ces édifices qui nous fascinent, nous intriguent, nous enchantent et nous rassemblent, capitalisent des heures, des mois, voire des années de travail, pendant lesquels des hommes, des compagnons, des anonymes ont œuvré dans l’ombre pour donner une forme au concept de l’architecte qui aura lui-même traduit la commande, le rêve, l’ambition d’un maître d’ouvrage.
Il est alors fascinant, au fil des visites, de se laisser transporter par cette métamorphose des lieux, ce jeu des compagnons qui jour après jour servent l’intelligence collective du projet.
Ainsi, à chaque instant, le chantier enchante mon œil de photographe.
Derrière les palissades, c’est le règne du bruit, des décibels, de la poussière, de la grisaille.
J’aime me fondre dans cet environnement et partir en quête de la magie des lignes, couleurs, lumières, scènes éphémères et transitoires qui progressivement laissent place à l’édifice imaginé par la créativité de l’architecte.
J’aime cette complicité d’un instant, échangée avec un compagnon qui accepte que la photo immortalise un regard fatigué mais rempli du plaisir de construire, de participer à la réalisation de l’édifice, même si parfois il y a un peu de pudeur à se laisser surprendre dans une tenue de chantier.
J’aimerai que lorsque l’on s’installe dans un nouveau logement, lorsqu’on se promène dans ces grands espaces ouverts au public, que l’on ait une pensée pour eux et que nous rendions hommage à la main de l’homme.
Croiser et capturer ces regards, c’est mesurer le plaisir pris à créer, fabriquer, interpréter, mettre en œuvre le dessin du concepteur, de l’artiste et de l’ingénieur.
Passer derrière la palissade du chantier, c’est un peu partager la vie de ces anonymes, immortaliser leur ouvrage, c’est aussi écrire l’histoire de l’édifice au fil de l’eau ou plutôt au fil des images.
Patrice PATTEE, Sceaux 22/05/2017